Hurel-Dubois "HD-31/321". |
© Jacques Moulin 2009 revu en 2011.
Profil offert gracieusement par Olivier Beernaert,
le HD-321 est représenté avec les marques de « Suez ».
Le HD-321 n° 01 en avril 1957 à Bir-el-Ater.
L’appareil n’a pas encore les capotages de roues (Photo originale André).
Très connu avant-guerre comme pilote d'hydravion, notamment à la société CAMS, le commandant Maurice Hurel, ingénieur de l'École Navale et de Supaéro, réalisa un exploit pendant la guerre en quittant l'aérodrome de Cannes en août 1943 à bord du prototype du SO 90 (voir l’article sur cet appareil) et rejoignit l'Algérie libérée par le débarquement des Alliés de 1942.
Ce type d'avion fut ultérieurement utilisé en AFN dans la version SO 95 "Corse", que nous étudierons plus tard.
Maurice Hurel en association avec Jacques Dubois, ingénieur de Centrale Paris, créa en 1947 la Société Hurel-Dubois, qui existe toujours et travaille en faveur de l'industrie aéronautique. Elle est maintenant contrôlée à 59 % par le groupe Safran.
Vue du prototype du HD-321 n° 01 en avril 1957 à Bir-el-Ater, avec train d'atterrissage non caréné (Photo André).
Cette société débuta par la réalisation d'un appareil, le HD-10. Hurel était convaincu de l'intérêt des ailes à grand allongement et voulait donc pouvoir essayer son hypothèse. Pour cela il construisit son prototype avec une voilure de ce type. Les ailes étaient très longues et très étroites.
Le Hurel-Dubois HD-10
Ce premier prototype, monoplace, le HD-10, vola pour la première fois le 25 août 1948. Il s'agissait d'un petit avion de 12 m d'envergure soit près du double d'un avion ordinaire de cette catégorie.
Les avantages du grand allongement sont une faible charge alaire et une traînée réduite si la voilure (comme celle des HD) dispose d'une corde étroite. Ce prototype est conservé au MAE.
Le Hurel-Dubois HD-31
Le second prototype, plus ambitieux, était un bimoteur de transport à train tricycle de plus de 45 m d'envergure, le HD-31. Son premier vol eut lieu le 27 janvier 1953 (F-WFKU puis F-BFKU), qui fut évalué par la Marine à la flottille 10S.
Le HD-31 fit un passage dans la Marine, il est connu pour avoir deux immatriculations : 10S 19 et 10S 29, nous n'en connaissons pas son utilisation par cette unité.
La formule se révéla tout à fait positive pour réaliser des vols relativement lents à faible incidence et intéressa les services de photographie aérienne, Air France et l'Institut Géographique National qui se montrèrent très intéressés pour une version améliorée, après le vol du HD-32 en décembre 1953.
Le Hurel-Dubois HD-321
Ce fut le HD-321, une version remotorisée réalisée en deux exemplaires (n° 01 et 02) avec un moteur plus puissant. Le n° 01 fut expérimenté en Algérie par l'Armée de l'Air, du 1er au 26 août 1956, par la SRE 09/540 (Section de Recherche et d'Expérimentation), unité rassemblant des moyens du CEV et du CEAM en AFN. Il fut ensuite utilisé par l'ELA 56 (affecté par note n° 1750 du 24 septembre 1956) toujours en AFN et ce jusqu'au 10 mai 1960.
Vue du prototype du HD-321 n° 01 probablement plus tard. Il est équipé de carénages de roues (Photo Doucelin).
Voilà comment un journaliste "d'Aviation Magazine", le photographe L. Espinasse, raconte son aventure sur le HD-321 n° 01 en août 1956. (Témoignage publié dans "Aviation Magazine" n° 209 de novembre 1956) :
« J'ai brusquement vu le plancher de la cabine basculer vers le ciel juste le temps de me cramponner et nous avions décollé, grimpant en ligne oblique impressionnante.
Le Hurel-Dubois a décollé et atterri à Tamalous (à côté de Philippeville) sur une piste de 230 mètres, à charge réduite, il est vrai. Il s'est comporté dans les turbulences au moins aussi bien que les autres appareils avec lesquels il s'est mesuré. Son pilotage s'est révélé classique, aucun de tous les vices dont on l'avait crédité ne s'est montré. Le témoignage du "patron", le commandant Pierre Laureys (ancien pilote et directeur du journal « Aviation Magazine » (NDA) admis aux commandes, en fait, pour nous, absolument foi.
Je n'étais que passager. Nous nous sommes posés dans notre porteur à Rass-el-Auch et à Bir-el-Ater (150 km au sud de Tébessa par la piste), sur deux terrains types "Morane", dont les pistes n'alignaient pas 400 mètres d'un sol approximativement nivelé au bulldozer et dont l'horizontalité était bien discutable.
Pour reprendre l'expression de Moynet (un ancien pilote du Normandie Niémen, qui était alors pilote d'essais, il fut aussi député de Saône-et-Loire et ministre, et concepteur d'avion (NDA), j'ai joué "avec le camion laitier faisant du porte à porte".
Nos bidons étaient des colis de légumes frais, sacs de pains, boissons et glace en barre que nous livrions "à domicile". Matériellement, notre démonstration a "gagné" les 30 ou 40 % de détérioration admis dans les parachutages ou droppages habituels (1).
Elle a démontré aussi l'inutilité des parachutes et, du même coup, supprimé le convoi, obligatoire jusqu'ici, pour les ramener au pliage, à la merci des embuscades. Voilà réalisées des économies directement chiffrables et elles ont dû peser très lourd auprès des états-majors.
Mais à Bir-el-Ater comme à Rass-el-Auch, nous sommes descendus au milieu des petits gars qui tiennent ces points d'appui vitaux. Pour eux, la glace qui n'est pas arrivée fondue, les lettres qu'ils ont pu nous confier "à expédier plus rapidement en France", les renforts que nous aurions pu amener, ont été les "bénéfices inappréciables" dont est créditée notre aviation".
Une autre vue du HD 321 n°01 en Algérie. (Archive Jacques MOULIN) .
Une photo du HD-321 n° 02 F-BHHA (Archives Ricco).
Après ces essais à première vue satisfaisants, l'appareil (n° 01) qui était propriété du SGACC, fut mis à la disposition de l'Armée de l'Air qui assurait sa mise en œuvre mais ne décidait pas de son emploi.
Il fut donc utilisé principalement comme avion de ravitaillement jusqu'en 1959. Pendant ces trois années il fut souvent aperçu et photographié lors de ses utilisations pour la liaison et le ravitaillement des postes isolés mais pouvant avoir une piste de 400 mètres minimum.
Une photo d'origine inconnue du HD-31 n° 01 aux couleurs de la Marine. On peut remarquer que les dérives sont différentes de celles du 321 (DR).
Le HD-321 n° 01 a subi au moins une révision chez le constructeur : visite détaillée, après 1.734 h 15 de fonctionnement et 2.088 atterrissages, dans l'usine Hurel-Dubois de Villacoublay; sortie le 31 juillet 1958.
Il fut aussi utilisé par les services spéciaux, avec lesquels il a été accidenté une première fois le 9 mai 1959 à Lyon-Satolas (un terrain en herbe qui n’était pas encore un aéroport international) : rupture d'un élément du train avant lors d'un atterrissage de nuit au cours d'une manifestation (confidentielle évidemment) organisée par l'Amicale Action (SDECE) (2). II fut réparé sur l'insistance du SDECE, qui appréciait particulièrement l'avion pour ses performances d'atterrissage court.
Il a été accidenté une seconde fois (avec apparemment les mêmes utilisateurs) le 10 mai 1960 à Evaux-Chambon (Creuse), aérodrome privé, lors d'un vol d'entraînement. Malgré ces bons résultats le HD-321 ne fut construit qu'à deux exemplaires.
Un deuxième appareil le HD-32 n° 02, fut lui aussi transformé en HD-321 n° 02, F-WHAA puis F-BHAA. Il semble qu'il fut utilisé par la DGAC (?) mais il fut accidenté à Rio de Janeiro (Brésil) le 30 octobre 1956, et probablement détruit.
Moyennant quelques modifications, seul l'IGN passa en 1955 un marché pour plusieurs appareils. C’est la version HD-34 qui fut choisie.
Le HD-34 fit son premier vol en février 1957 et fut livré à l'IGN en huit exemplaires, dont certains sont aujourd’hui encore conservés notamment un à Dugny (dans les réserves du Musée de l’Air) et un autre à Creil où sont encore basés les avions de l’IGN.
Récemment (en 2010) dans un journal aéronautique, un projet d’avion économique bi-turbopropulseurs présenté par Boeing apparut et l’on peut dire qu’il ressemble beaucoup au HD-130 représenté ci-dessous.
Caractéristiques du HD-321
(Peuvent être en partie fausses je n'ai pas trouvé de source incontestables sur le sujet. Merci de compléter, si vous pouvez, avec des indications vérifiés).
Constructeur : Hurel-Dubois
Type : bimoteur ailes hautes à grand allongement
Équipage : 4
Missions : transport
Date du premier vol : 27/01/0953
Construction : métallique
Dimensions
Envergure : 45 m
Longueur : 22 m
Hauteur : 6,83 m
Surface alaire : 100 m²
Charge allaire :
Masse
Masse à vide : 11450 kg
Charge utile :
Masse totale en charge : 20000 kg
Performances :
Vitesse maxi : 290 km/h
Vitesse de croisière : 275 km/h
Vitesse ascensionnelle :
Autonomie : 2200 km (environ 8 heures)
Plafond pratique: 8000 m
Distance franchissable :
Altitude de croisière :
Rayon d’action :
Communication radio :
Moteur
Marque : Wright
Nombre : 2
Type : 982-C9 HE 2 (Cyclone)
Configuration : en étoile
Refroidissement : air
Suralimentation :
Puissance normale au sol : 1525 ch
Puissance à
Puissance au décollage :
Equivalent puissance :
Régime de l’hélice :
Alésage :
Course :
Cylindré totale :
Taux de compression :
Hélice
Marque :
Type :
Nombre de pales : 3
Diamètre :
Le prototype du HD-31 en vol, une vue qui permet de comprendre
le surnom de "Couteau-Volant". (Photo Dengremont).
Photos de HD 34 de l'IGN
Photos © Jacques MOULIN
Le HD-34 est la version de série, prévue pour l’IGN pour lequel ils ont volé pendant de longues années.
Un HD 34 de l'Institut Géographique Nationale de passage à Bron (69) en 1980
(Photo © Jacques MOULIN.)
Le F-BHOO photographié à Bron en avril 1980. (Photo © Jacques MOULIN).
Le même avion mais à Brétigny en 1994. Photo © Jacques MOULIN
Le F-BHOO photographié à Bron en avril 1980. Photo © Jacques MOULIN.
Caractéristiques HD 34
(Peuvent être en partie fausses je n'ai pas trouvé de source incontestables sur le sujet. Merci de compléter, si vous pouvez, avec des indications vérifiés)
Constructeur : Hurel Dubois
Équipage : 5
Missions : Photo aériennes (IGN)
Date du premier vol : 26/02/1957
Constructions :
Dimensions
Envergure : 45,16 m
Longueur : 23,61 m
Hauteur : 8,40 m
Surface alaire : 100 m²
Charge allaire :
Masse
Masse à vide : 12300 kg
Charge utile :
Masse totale en charge : 18600 kg
Performances :
Vitesse maxi :
Vitesse de croisière : 280 km/h
Vitesse ascensionnelle : 4,8 m/s
Autonomie : 2600 km
Plafond :
Distance franchissable :
Altitude de croisière : 8000 m
Rayon d’action :
Moteur
Marque : Wright
Nombre : 2
Type : 982-C9 HE 2 (Cyclone)
Configuration : en étoile
Refroidissement : air
Suralimentation :
Puissance normale au sol : 1525 ch
Puissance à :
Puissance au décollage :
Equivalent puissance :
Régime de l’hélice :
Alésage :
Course :
Cylindré totale :
Taux de compression :
Hélice
Marque :
Type :
Nombre de pales : 3
Diamètre :
Un autre projet
Un projet de 1964 pour un avion équipé de deux turbomoteurs Astazou, ce projet ne fut pas suivi.
© Jacques Moulin, 2009/2012.
(1) Un lecteur met en doute les chiffres alors indiqués par le pilote-journaliste qui accompagnait Moynet, il faut dire que tout le monde exagérait probablement dans l'enthousiasme pour mettre en valeur les performances de l'appareil, effectivement si les résultats des essais avaient été si encourageants l'appareil aurait certainement été construit en série.
(2) Alors SDECE, Service de renseignement français actuellement DGSE.
Remerciements à Régis Biaux, Gilbert Neel, Jean-Paul Bonora, Philippe Ricco, J.L. Bléneau et Bruno Parmentier (site Aviafrance) et les participants d'Aeroforums.
Vous pouvez voir l'épave du HD-321 telle qu'elle existe actuellement dans une propriété privée de la Creuse sur le site ci-joint.
http://www.survoldefrance.fr/affichage2.php?img=19305
Article publié dans l'Ancien d'Algérie n° 474 de février 2009.